Génelard, quand la mémoire est plaisir et devoir !
Pour réaliser ce reportage, nous avons une fois de plus eu la chance ou plutôt l’immense privilège d’avoir rencontré des hommes passionnés par leur village, par son histoire, par son patrimoine, des hommes qui nous ont donné accès à des ouvrages riches de recherches, de rigueur historique, d’émotion.
En particulier, nous nous sommes beaucoup appuyés sur un livre réalisé par l’Association locale « PAGE » (Recherche du Patrimoine Génelardais) dont le Président (Fondateur) de l’époque était Jean Bletton. Aujourd’hui, « PAGE » est présidée par Georges Martinon.
Nous remercions donc vivement pour leur accueil et le don de leurs connaissances, le Maire Jean François Jaunet et Fernand Terrier, membre de « PAGE », véritable Mémoire de Génelard. Nos remerciements vont aussi à l’ensemble de l’Association « PAGE », qui, fondée en 1998, ne cesse depuis, de rechercher et de transmettre le passé, patrimoine historique, industriel, agricole, culturel et surtout humain de ce beau village qu’est Génelard. Notez aussi que « PAGE » compte parmi ses membres 2 associations que nous voulons aussi remercier, « La Physiophile » et « Les Amis du Passé de Palinges et de sa Région ».
Mais d’où vient donc ce nom de Génelard ?
II existe plusieurs versions plus ou moins crédibles, dont une largement plus probable. Mais peut-être que toutes ces versions ont contribué au résultat du nom actuel, sachant que :
- Le nom est apparu pour la première fois dans des textes latins (comme le « de Bello Gallico » de Jules César) où ce dernier, en 58 avant Jésus Christ, voulant aider ses alliés Eduens et en poursuivant les Helvètes, traversa une rivière (La Bourbince ?) au gué de Genolium.
- L’abbé Courtépée, lui, cita plusieurs orthographes : Genelaium, Geneculum, ou encore Geniolaium…. était-ce bien de Génelard dont il était question ? Mais des spécialistes de la guerre des Gaules penchent pour écrire que les troupes romaines sont bien passées par un gué sur la Bourbince à Génelard.
- En l’an de grâce 876, un texte latin (dans le Cartlaire de Persy, imprimé en 1664 par Etienne Perard) fait plusieurs fois mention de Génelard.
Les versions de l’origine du nom viendraient :
- Pour la plus plausible de « geniculum », genou en latin et par extension méandre, courbe ce qui parait plausible puisque Génelard se trouve dans un méandre important de la Bourbince.
- D’une relation entre Gers Il Art, nom germanique et le patronyme de la cité, cela d’après Mademoiselle Annie Lardet.
- De Genus Latronum, petite cité existant du temps des Romains entre Augustodunum et Lugdunum et qui, traduit littéralement donne : « méandre marécageux ».
- Du patronyme Golonialence, version proposée par André Déléage, professeur à la Sorbonne et repris dans son livre sur les lieux dits par Mademoiselle Forien.
Mais bon… que le nom vienne de ci ou de là, ce dont on est certain, c’est que des hommes préhistoriques sont passés en ce lieu puisqu’on été découverts sur les collines de La Petite Laugère des vestiges caractéristiques de l’époque des Néandertaliens, il y a 80 000 ans. Plus tard, l’Homme de Cro-Magnon ou Homo Sapien qui a laissé de nombreuses traces (Roche de Solutré, Oudry, Chassey ), en particulier des silex parfaitement taillés au marteau en bois de renne, a, à coup sûr utilisé l’axe Bourbince-Dheune pour se déplacer et est passé par Génelard.
Et ce dont on est sûr, c’est de la présence de l’homme à Génelard à l’âge de bronze (à partir de 2000 avant Jésus Christ) et à l’âge de fer (à partir de 800 avant JC).
Les vestiges retrouvés à Génelard à l’âge de bronze sont certainement uniques au monde et montrent une forte activité humaine dans la cité à cette période. Par exemple :
- Une cinquantaine d’outils en bronze émanant de l’atelier d’un dinandier et d’un fondeur ont été retrouvés à Génelard en 1975, lors du creusement des fondations d’une maison à Petite Laugère. Cette découverte fondamentale, rassemblement du plus grand nombre d’outils jamais trouvés au monde de cette période (1150 à 1100 avant JC) est rapportée dans tous les livres scientifiques et archéologiques mondiaux. Ces outils sont déposés au Musée Denon de Chalon sur Saône. Cette découverte prouve une population non négligeable à Génelard à cette époque et avance l’embryon de la vocation métallurgique du village qui va ensuite se développer.
- Un sanglier en bronze, qui se trouve au Musée des Antiquités de Saint Germain en Laye, émanait probablement d’un artiste de l’âge de bronze. Il a été remis au Musée en 1867 par Monsieur Changarnier-Moissenet de Beaune (une entreprise de Beaune qui travaillait à Génelard avait fait cette découverte).
Aquarelle de l’ancien pont sur la Bourbince face au Château
Après la Préhistoire, l’Histoire ancienne dont on n’a guère trouvé de choses spécifiques, mais il est certain qu’il faut continuer à chercher puisqu’on a découvert très récemment un camp romain à Perrecy (Patriciacum) et également d’autres découvertes à Baron, Bragny, Fautrières, Colonne, Champlecy, Palinges, Le Montet etc… Les Celtes et les Eduens ont occupé Génelard. Et puis il y eut la guerre des Gaules qui opposa les Romains (qui assistaient les Eduens) et les Helvètes (aidés des Séquanes,habitants à l’Est de la Saône).
D’après certains historiens, nous l’avons déjà écrit, Jules César serait passé par Génelard avant de prendre position sur la colline de Montmort près de Toulon sur Arroux, colline sur laquelle il livra bataille aux Helvètes . Cette bataille, aurait fait 250 000 morts. Vous rendez vous comte que ce serait près d’un demi-million de personnes avec plus de 5000 cavaliers qui se sont battus dans cette fameuse bataille et qui sont passés à Génelard ? Cà a dû les impressionner les Génelardais de l’époque !
Après la décroissance de l’autorité romaine, ce sont les Burgondes (envahisseurs germaniques) qui envahissent et colonisent la région. Génelard a dû connaître une certaine prospérité et une forte croissance pendant la période Mérovingienne, la preuve, la découverte d’une quantité de sarcophages, sur 30 ou 40 ares, autour de l’église, ceux-ci datant d’autour du XIIème siècle.
Parmi ces cercueils dont beaucoup ont été pillé, dans certains, intacts, on fit des découvertes intéressantes dont dans l’un, de l’or filé très bien conservé, provenant sans doute de quelque riche vêtement et un grain de bracelet ou collier en ambre complètement oxydé. Dans un autre, on a trouvé un vase d’étain oxydé également et aussi dans un autre, sept grains de collier ou bracelet en verre de couleur et un morceau de métal paraissant avoir fait partie d’une arme.
Ces sarcophages sont dispersés dans le village, servent de bacs à fleurs et deux se trouvent encore dans le parc du Château. Toutes ces précisions sont données dans un rapport de M. Bullion, Président des Mémoires de la Société Eduennes d’Autun, lors de la séance du 19 juin 1879. Il est certain que d’autres fouilles seraient prometteuses de grandes découvertes.
Entre le IXème et le XIème siècle, avec l’arrivée du Catholicisme et après le sacre de Charlemagne (an 800), Génelard se trouve dans le « pagus Augustodunum », placé sous la Responsabilité d’un Evêque puis du Comte Hildebrand, un de ses fidèles sujets, d’origine germanique, comme lui.
Un fait mérite d’être cité, c’est le passage sur un pont de la Bourbince en 1190, selon la société Eduenne, de la 3ème croisade, avec à sa tête Richard Cœur de Lyon et Philippe Auguste qui s’étaient donnés rendez vous à Vézelay et qui se dirigeaient vers Lyon qu’ils ont atteint en 7 jours (250kms), le 10 juillet de cette année 1190. Là encore, 50000 croisés traversant la Bourbince à Génelard, çà a dû en impressionner des Génelardais !
Ce n’est qu’en 1272, lorsque le Charolais fut érigé en Baronnie,que Génelard, dépendra de la châtellenie du Sauvement . Avec son 1er Seigneur, Guillaume de Génelay, Génelard entre dans une Histoire mieux connue en 1307.
Une période très sombre allait régner sur la région au début du XVème siècle, avec des épidémies, des guerres, des brigandages et des disettes sans compter la « peste noire », c’est le « temps des douleurs » d’après de nombreux historiens. C’est en 1437 qu’apparait l’épisode des « Escorcheurs » à Génelard, ce nom d’escorcheurs est donné à des bandes qui dépouillaient les habitants des villages qu’ils rançonnaient, et qu’ils torturaient jusqu’à les égorger en cas de résistance. Dans le livre « Génelard, histoire d’un village en Bourgogne du Sud », écrit par l’association « PAGE », sont relatés des faits atroces mettant en cause ces escorcheurs. Après que l’autorité royale se fut renforcée en 1450, les escorcheurs disparurent et ceux qui persistent sont passés par les armes des Seigneurs ou par les fourches des paysans.
Jusqu’à la Révolution, la Terre de Génelard a appartenu à de nombreuses familles :
- 1307 : les Génelay (châteaux de Liman et Montéguillon)
- 1404 : Pierre de Génelay vend à Guillaume de Banchereau les terres et fonds en la Paroisse de Génelard, relation entre le château de Liman et la famille de Toulangeon.
- 1415 : 1ère mention de la maison forte de Laugère et de Jacques de Busseul.
- 1442 : La famille de Busseul conserve la Seigneurerie et le château jusqu’en 1613.
- 1613 : Vente à la famille d’Amanzé
- 1622 : Gaspard de Franay vend la Seigneurerie de Génelard à Claude de Ganay, Seigneur de Monttéguillon.
- 1658 : Davide de Ganay achète la Seigneurerie et la terre de Laugère. A partir de là, Laugère, Montéguillon, Génelard, Fairènes, Le Seul, Les Places, Les Champs, Vernizy, et Fulcy sont réunies (toutes ces Seigneureries), et appartiennent à la seule famille de Ganay.
- 1719, la famille Mayneaud de la Tour en fait l’acquisition. Elle va s’allier aux de Tournon et avec les de Busseul et les d’Amanzé, ces 4 familles familles possèderont les 4 châteaux de Génelard.
Aujourd’hui ne subsiste que le Château de Croix ou Château de Génelard, entre l’église et le moulin.
C’est pendant la Révolution que Génelard est érigé en commune, le 7 février 1790. L’Histoire religieuse de Génelard autour de son église du 12ème siècle, il y eut une autre église , la chapelle Saint Pierre es Liens , dans le parc du Château, avant la « laïcité » est très bien évoquée dans l’ouvrage de « PAGE ».
Sous l’Empire, Napoléon avait pour Ami et fidèle et Grand Serviteur le Comte de Tournon (1778 – 1833) qui fut :
- Super Intendant de Byreuth
- Préfet de Bordeaux,
- Commandeur de la Légion d’Honneur,
- Préfet de Rome jusqu’en 1814 ,
- Préfet de Lyon,
- Pair de France
Raconter tout serait beaucoup trop long et nous vous invitons à vous procurer le livre de « PAGE », afin d’y découvrir l’époque Napoléonienne et l’occupation autrichienne de 1814.
Une grand période de l’histoire a également marqué la vie à Génelard, ce sont les 2 guerres mondiales.
- Dans la guerre 14-18, de nombreuses troupes sont passées par Génelard pour se rendre sur la crête des Vosges et cela a redonné le moral aux habitants. Les usines tournaient « à cause » de la guerre, plus de 200 Génelardais travaillaient à fabriquer des douilles d’obus (ex : chez Fournier). 15 Génelardais furent tués au front en 1915 et encore 11 en 1916. Et puis, on dit que l’ingénieur Archer, Génelardais sortant de Polytechnique par son invention d’un nouveau procédé pour améliorer l’efficacité des canons va faire gagner la guerre grâce à l’application de cette découverte au canon de 75. 4 morts encore en 1917, tous ces morts tués au champ d’Honneur sont bien sûr inscrits au Monument aux Morts place du Champ de foire.
- La guerre 39-45 : Dès septembre 1939, une partie des hommes de Génelard sont mobilisés pour protéger les usines et les voies ferrées.Le 10 mai 40, c’est l’exode et Génelard est à nouveau un lieu de passage, dans la 2ème quinzaine de juin, çà bouchonne. Le village est bombardé le 16 juin. Le 19 juin, les Allemands occupent Génelard. La ligne de démarcation est mise en place, elle passe par Génelard, elle suit d’abord le canal puis sera décalée plus à l’est sur la route de Charolles. Toute l’histoire de cette ligne de Démarcation et tout ce qu’elle a impliqué est remarquablement expliqué dans le Musée d’Interprétation de la Ligne de la Ligne de Démarcation, lieu empli d’histoire, d’émotion et d’humanité, à visiter c’est sûr, voir aussi le site www.lignededemarcation.fr .
Les années de guerre furent comme partout terribles et les Génelardais en ont payé un lourd tribut. Et puis, du 22 au 26 août 1944, il y eut la fameuse bataille de Génelard qui débuta dans la « tranchée » et se poursuivit à l’école. Les Allemands se concentrent à l’école et leurs renforts se replient à Ciry. Le préau de l’école s’enflamme, il est détruit et sera reconstruit en 1945. Après maintes péripéties bien détaillées dans le livre de « PAGE », les 27 allemands furent faits prisonniers et remis aux troupes régulières après la Libération. Les Maquisards Pierre Guidollet, René Moratille, Lucien Mulot, Pierre Giroux, Julien Panquin, et Henri Perrachon t laissèrent leur vie. Les combats se poursuivent dans la région jusqu’au 26 août. Et c’est enfin la Libération le 6 septembre avec l’entrée à Génelard des blindés alliés du 9ème RCA de la 1ère DB.
Génelard est cité à l’ordre du régiment par décret du 11 novembre 1948 : « Commune qui a fait preuve durant l’occupation d’un grand patriotisme par l’aide qu’elle a apportée aux personnes recherchées par l’ennemi au passage de la ligne de démarcation. A souffert des représailles ennemies ayant entraîné la destruction de 11 immeubles », signé Max Lejeune, Secrétaire d’Etat aux Forces Armées.
Quand on passe à Génelard, soit par le levée du Canal, axe Montceau-Paray le Monial ou sur la Départementale, axe Perrecy les Forges-Charolles, est-ce qu’on se doute de la richesse de l’histoire de ce village blotti dans le méandre de sa Bourbince ? Rivière sur le cours de laquelle, on l’a vu sont passées des célébrités historiques, par des gués ou des ponts (voir la superbe aquarelle de l’ancien pont qui daterait de 1350, face au Château), rivière qui a toujours joué un rôle économique et social important avec ses nombreux moulins qui aujourd’hui ont soit disparu, soit ne sont plus en activité, comme le Moulin près du Château de Croix (voir nos photos).
Et puis, en plus des personnages historiques qui ont régné sur les terres où qui y ont transité, Génelard compte aussi des artistes renommés comme :
- Le bronzier de Petite Laugère connu dans le monde entier (sanglier en bronze cité plus haut et outils)
- Pierre Etroit, sculpteur talentueux, ferronnier d’art récemment disparu
- Jean Laronze (1852 – 1937), grand peintre du Charolais, aux œuvres innombrables sur la campagne locale font connaître Génelard dans les musées du monde entier (« La Bourbince à Génelard, « l’étang de Chancenot », « la sente de la Valtreize », « le retour des champs », le pré du moulin », « le soir en Charolais », « l’angélus » etc… De nombreux ouvrages lui rendent hommage, citons en deux : « Jean Laronze, sa vie son œuvre » par Abel Moreau aux éditions de la Librairie de l’Opéra, et « Jean Laronze, peintre en Bourgogne », par son arrière-petit fils Marc Guillaume, ouvrage absolument remarquable. Jean Laronze a aussi fait beaucoup pour la commune (nombreux dons, bienfaiteur de jeunes artistes, Conseiller municipal), sa famille possède toujours le château des champs à la sortie sud de Génelard.
MAISON OU A VECU ET TRAVAILLE JEAN LARONZE
- Jean Maillot, (1932 – 1996) portraitiste, aquarelliste, scénographe de renommée mondiale.
Aujourd’hui Génelard, village de 1500 habitants vivant sur un territoire de 2200 hectares, à une altitude moyenne de 300m, fait partie de la CCM (depuis 2008).
Ce village est fier de sa situation entre rivière et canal, à un nœud important de communication, au milieu d’un magnifique paysage de bocage et de quelques bois, de sa situation près de la Gare TGV, fier de ses commerces, de son collège (275 élèves), de ses écoles, de sa garderie de sa crèche, de son restaurant scolaire, fier aussi de son passé industriel (Fournier – Mouillon, Ponceblanc, Usine Laffont tuileries etc…), de son sous sol avec l’argile et le fer, fier de ses activités agricoles avec 15 exploitations dont la moyenne d’âge des exploitants n’est que de 45 ans et fier encore de ses fromages AOC de chèvre (l’AOC a débuté à Génelard).
Les Génelardais le crient haut et fort : « beaucoup des pavés de Paris viennent de Génelard ».
Génelard possède son véhicule électrique, sachez que les habitants qui entreprennent des travaux pour économiser l’énergie sont exonérés à 100% de la part communale sur la taxe d’habitation. Même l’école, à l’architecture de château a une partie de son toit en panneaux solaires, ce qui permet des économies d’énergie non négligeables.
L’association « PAGE », actuellement, met en place dans le village et ses alentours un circuit pédestre touristique avec 17 panneaux qui feront découvrir à tous, les endroits de mémoire du village.
Dernièrement, le 1er Week end de juillet, a eu lieu comme tous les ans le fameux « Genestival »qui a réuni 2500 spectateurs, cette manifestation organisée par « Action Jeunes », l’une des 40 associations du village est à voir en 2014.
Jean François Jaunet, Maire de Génelard
Voilà, une fois de plus, sans prétentions, nous avons voulu vous donner envie de rencontrer un village de chez nous. Nous prions les puristes d’excuser les quelques erreurs que nous aurions pu commettre et, sincèrement, nous vous conseillons de passer à Génélard, comme l’ont fait avant nous les Jules César, Richard Cœur de Lion, Philippe Auguste, Napoléon, tant de héros des guerres etc…
Oui à Génelard, çà sent si bon la France !
Jean Michel LENDEL
SCULPTURE DE PIERRE ETROIT
FERNAND TERRIER
// ]]>