» Peut être souhaiterez vous faire partager aux lecteurs le témoignage qui suit, relatif à un mobilisé de la Grande Guerre, déraciné de son champ, et projeté dans la tuerie sur le front italien, où beauté et horreur se sont côtoyées.. « tel est le message que nous avons reçu d’un de nos lecteurs : Serge Roigt. Bien évidemment , nous accédons à cette demande car le texte est émouvant à souhait et surtout vécu !
Voici ce témoignage :
» Simple agriculteur soucieux de la croissance de ses asperges et autres haricots verts dans un petit village des Pyrénées Orientales qui l’avait vu naitre en 1890, mon grand père revint vivant du théâtre des opérations sur le front italien de la Grande Guerre .
Vivant, mais meurtri à jamais, au souvenir de tous ces corps disloqués par la mitraille, à l’évocation de ce train de permissionnaires MILAN-St JEAN de MAURIENNE direction LYON, déraillant dans le froid du 12 décembre 1917 avec son millier de soldats à peine distraits du champ de bataille pour perdre la vie comme des voyageurs partis en détente.
Brancardier militaire, il parcourait le sol ensanglanté, dans la foulée des régiments français appelés au secours des italiens après le désastre de CAPORETTO du 24 octobre 1917.
Ses yeux toujours bleus, quittaient leur voile de tristesse au souvenir des opéras de la Scala de MILAN, Serafin TULLIO en ayant repris la direction musicale après 3 ans de fermeture. Il était assidu auprès de ce Centre prestigieux, lors de ses permissions, dédaignant les gargotes de garnison, et comme pour lui rappeler que le Beau existait encore quelque part, à côté de l’affreuse tuerie.
Il fredonnait quelques passages de ROSSINI ou VERDI, longtemps après, et mon enfance qu’il conduisait, après le départ de ma mère, ne savait rien de ce drame secret.
Paix à toi, grand père, humble héros de la triste histoire. «
Serge ROIGT